Histoire de l'Ukraine

Démarré par Archives, 17 Novembre 2023 à 17:30:48

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Posté par: comète (IP Loggée)
Date: 28 décembre, 2008 04:54

Le très très long article qui suit me semble être un signal important. Reste à savoir ce que des connaisseurs beaucoup plus avancés que moi dans leurs études ukrainiennes pensent de son contenu.

[www.diploweb.com]

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Posté par: Paul (IP Loggée)
Date: 29 décembre, 2008 15:59

J'ai tiqué à plusieurs reprises en lisant ce texte très long (25 pages A4) mais je ne répondrai pas à tous les points soulevés car ça prendrait encore plus de place avec l'argumentation nécessaire.

Puis j'ai remarqué dans les notes, que le nom de Roger Portal, et son livre « Russes et Ukrainiens, Flammarion – Questions d'histoire, Paris, 1970 » était cité plus souvent qu'à son tour jusqu'à être presque la seule référence qui ait guidé l'auteur de l'article.
La date de parution de ce livre « de référence » (?) m'a intrigué et je me suis renseigné sur cet auteur.
C'est ainsi que j'ai appris que depuis 1950, il est l'un des « papes » français de l'histoire de la Russie et de l'URSS.

Pas étonnant que sa vision des Slaves de l'Est soit, au minimum, Russo-centrée !
Ce qui, avouons le, gauchit légèrement (ironie !) la vision de l'histoire, de l'ethnographie et de la sociologie ukrainienne telle qu'elle est exposée.


L'une des plus théories les plus grossières, entièrement inventée au XVIIIe / XIXe siècle par des « savants officiels » russes voulait que tous (!!!!) les habitants de la Rous' kievienne, fuyant les Mongols au XIIIe s, se seraient réfugiés dans les forêts du Nord.
Etablis dans cette contrée, ils auraient formé le peuple Grand Russe, développé le village de Moscou et permis la conquête des voisins de cette nouvelle principauté afin de reconstituer l'Empire de l'ancienne Rous' rebaptisée Russie.

Pour compléter, l'Ukraine, vidée de ses habitants, aurait été occupée par des peuplades descendues des Carpates et abâtardies de Polonais : ce seraient les Ukrainiens actuels !

Cette théorie avait tout simplement été bâtie pour justifier la position dominante des Grand Russes sur les autres peuples de l'Empire.


A rapprocher de cette citation se trouvant dans l'article du Cdt de Jabrun :

    Citation:
    « Par ailleurs, après l'invasion mongole, Kiev perd sa prééminence aux dépens de Moscou [La chute de Kiev date de 1240 alors que la Principauté de Moscou fut fondée en 1340 ! et le fortin qui donna naissance au village fut érigé au XIIe siècle alors qu'il se trouvait sur le territoire de la Principauté de Rostov la Grande, elle-même dépendant de la Rous']. Pour les Russes, le cœur de la Rous' se serait déplacé vers le nord. Il leur semble tout légitime que la Moscovie soit le descendant de la Rous'. Pour eux, la Rous' perdure et la Russie doit en rassembler les héritiers sous sa coupe. Biélorusses et Ukrainiens devraient donc lui être soumis. Leur lecture historique justifiera et justifierait encore la négation de cette identité ukrainienne. C'est la raison pour laquelle ils appellent l'Ukraine, Malo Russia, petite Russie. »


Sur le même site, on trouve aussi, heureusement, cet article de Daniel Beauvois, qui offre un autre éclairage sur la manière dont on bâtit l'histoire de l'Ukraine en Russie ... et en France par la même occasion : [www.diploweb.com]

La citation suivante résume, mieux que je ne pourrais le faire, le sentiment que j'ai ressenti :

    Citation:
    « La bibliographie des rapports russo-ukrainiens est abondante. Il suffira ici de rappeler la manière dont les historiens russes ont longtemps, et encore récemment, imposé la vision « moscocentrique » de leur empire aux naïfs historiens du monde entier qui, en général, ne se sont presque jamais donné la peine de lire autre chose que ces Russes, fuyant les archives ou s'abritant derrière leur prétendue fermeture, et ont donc enseigné les mêmes théories et publié des livres allant toujours dans le sens russocentrique. En France, les piliers les plus sûrs de cette tendance furent, à l'époque soviétique, Roger Portal et, dès avant la « transition » (qui n'en finit pas et serait plutôt une continuité), Hélène Carrère d'Encausse (élève de Roger Portal). J'ai déjà largement expliqué combien ces positions étaient insuffisantes, mais, avant de montrer quelles autres constructions doivent être prises en compte pour esquisser le passé ukrainien, revenons encore sur le monumental détournement d'héritage opéré par les Russes pour se légitimer en tant qu'État inscrit dans la longue durée.
    ..................... »

    (s) Professeur Daniel Beauvois. Historien, Université de Paris I-Panthéon-Sorbonne.

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Posté par: comète (IP Loggée)
Date: 29 décembre, 2008 16:43

Merci Paul de ces précieuses indications qui me permettront de lire attentivement avec moins de naïveté.

Savez-vous que Beauvois est bon quand il parle des confins polonais, ce qui est vraiment son domaine, mais beaucoup moins bon quand il écrit sur toute la Pologne où il pâtit lui aussi du caractère daté de ses sources, ce qui l'amène parfois à des facilités dans lesquelles il révèle parfois ce qu'il croyait avant d'aller en Pologne. Il met aussi en fureur certaines de mes relations, qui voudraient que les Polonais n'aient eu que le beau rôle dans les confins. Pas facile de plaire à tout le monde quand on est historien!


Il m'avait cependant semblé que la conclusion de l'article de De Jabrun ouvrait une porte mentale, jusque-là bien trop verrouillée.

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Posté par: comète (IP Loggée)
Date: 29 décembre, 2008 16:50

comète a écrit:
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>
> Il m'avait cependant semblé que la conclusion de
> l'article de De Jabrun ouvrait une porte mentale,
> jusque-là bien trop verrouillée.

J'ai surtout apprécié qu'il soit commandant, car pour moi c'est une indication sur les portes mentales qui s'ouvrent dans l'enseignement de l'école militaire.

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Posté par: comète (IP Loggée)
Date: 29 décembre, 2008 18:03

J'avais déjà lu le texte de Beauvois auquel vous renvoyez, mais bien trop rapidement pour tout intégrer de ce qu'il écrit sur un passé lointain sur lequel je suis fort ignare.

Cette fois-ci, pour le clin d'oeil, j'ai relevé dans son texte un truc tout à fait révélateur de la tendance à voir dans la droite polonaise du PiS une renaissance de la Endecja et à se méfier de l'Endek qui, selon certains, sommeille en tout Polonais de droite. Inquiétudes inutiles, car franchement, les Kaczynski ont très bien intégré l'héritage de Giedroyc, tellement bien que plus à droite, on reproche à Lech Kaczynski de ne pas retourner le couteau dans la plaie des massacres réciproques en Volhynie pendant la deuxième guerre mondiale, quand il se rend à des commémorations ukrainiennes.

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Posté par: Paul (IP Loggée)
Date: 29 décembre, 2008 21:21

comète a écrit:
-------------------------------------------------------
> Cette fois-ci, pour le clin d'oeil, j'ai relevé
> dans son texte un truc tout à fait révélateur
> de la tendance à voir dans la droite polonaise
> du PiS une renaissance de la Endecja et à se
> méfier de l'Endek qui, selon certains, sommeille
> en tout Polonais de droite.


Heureusement, Daniel Beauvois était excessivement pessimiste. La ligne de conduite de la diplomatie polonaise est restée stable en ce domaine.

Depuis 1987, des évêques catholiques polonais et le cardinal Housar, actuel archevêque suprême de l'Eglise gréco-catholique entreprennent un processus de réconciliation polono-ukrainien. Voir, par exemple cette interview qui date de 2003 (60e anniversaire des « évènements » de Volhynie) : [www.ukraine-europe.info]

De même, alors que l'Ukraine était toujours sous l'emprise de l'URSS, c'est de Pologne que vint le soutient au mouvement Rukh de Galicie qui, en mai 1989, manifesta et hissa à nouveau le drapeau ukrainien dans les villes et villages d'Ukraine occidentale.
Ensuite, après 1991, ce fut la relève par les hommes politiques polonais et ukrainiens.

Les choses sont-elles faciles ? Certes non car le contentieux est lourd.
Les parents des victimes, on le comprend, et les organisations nationalistes des deux pays mettent des obstacles et ralentissent ce processus. Néanmoins, les choses avancent lentement mais sûrement. L'attention portée par les divers gouvernements polonais à l'évolution politique de l'Ukraine favorise cette démarche. De même, les pourparlers de ces mêmes gouvernements concernant des aspects moins spectaculaires comme, par exemple, les facilités de passage de la frontière à leurs ressortissants sont aussi un élément de rapprochement pour les deux pays.

J'ai, il y a bientôt deux ans, mis en ligne sur ce forum la traduction d'un article de l'historien Rafal Wnuk, membre de l'IPN, traitant de l'historiographie récente polonaise sur les relations polono-ukrainiennes pendant la seconde guerre, y compris ce qui a trait à la Volhynie.
Si des approches diverses existent, dont certaines irréconciliables, il y a lieu d'être optimiste, comme le laisse entendre sa conclusion. Voir [www.klub-beskid.com]

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Posté par: René (IP Loggée)
Date: 30 décembre, 2008 09:37

Merci Paul de la synthèse.
J'étais à Moscou pour le 800ème anniversaire de la ville, et il me semble de mémoire que la ville fut fondée par les vikings, ce qui, si j'ai bien tout saisie, amène certaines contradictions dans la fondation de la ville de Moscou.
Moscou étant une étape sur le chemin des Varègues aux grecs.

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Posté par: Paul (IP Loggée)
Date: 30 décembre, 2008 14:43

Pour ce qui du rôle des Varègues :

Un condensé de l'histoire de la Rous' kiévienne que je vous invite à lire. C'est intéressant, bien écrit et facile à lire.
Cet article fait le tour de ce qui est connu aujourd'hui sur l'empire médiéval de Kiev : [www.clio.fr]



Quant à Moscou.

Au départ, ce n'était qu'un petit village de cabanes de bois comme il en existait un grand nombre à cette époque. La région était alors peuplée de Slaves orientaux et de Finnois. La première mention qui en est faite date de 1147 quand le Velikiy knyaz (Grand Prince) de Kiev, Yuri (= Georges), fut chassé de son trône et se réfugia au nord dans la principauté de Vladimir-Suzdal.

En 1156, on l'entoura d'une palissade de bois afin de servir de refuge et de lieu fortifié contre les incursions venues de l'Est. Il est possible que la défense était assurée par des Varègues (Vikings) qui servaient souvent comme mercenaires dans les armées de la Rous' mais je doute qu'ils aient construit un quelconque village, même nommé Moscou.

La localité fut saccagée et détruite, comme de nombreuses autres par les Mongols en 1237. Elle ne fut reconstruite qu'un siècle plus tard, en 1327, et sa position favorable sur la Moskova lui permit de devenir la nouvelle capitale (avec Tver) de la principauté de Vladimir-Suzdal qui relevait alors de la Horde d'Or mongole.

Un autre Yuri, devint prince puis grand-prince de Moscou en 1340 grâce à son dévouement pour la cause mongole : il épousa la sœur du Khan et se chargea de récolter le tribut dû aux Mongols auprès des autres principautés du nord de la Russie actuelle (Vladimir-Suzdal, Novgorod ...). Son fils, Ivan Ier suivit la ligne de son père et parvint à rendre héréditaire le titre de grand-prince de Moscou.
Le territoire de cette principauté était, au départ, assez réduit comparativement à ses voisines mais le soutien mongol lui permit de s'agrandir progressivement à leurs dépens.

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Posté par: René (IP Loggée)
Date: 31 décembre, 2008 09:00

Super bon reveillon grand prince Paul.
A l'année prochaine.

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Posté par: comète (IP Loggée)
Date: 31 décembre, 2008 12:14

René a écrit:
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> Super bon reveillon grand prince Paul.
> A l'année prochaine.

Grand Prince et Roi de l'histoire de l'Ukraine,et bonne année!

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Posté par: Paul (IP Loggée)
Date: 31 décembre, 2008 13:36

 Á tous les participants et/ou lecteurs de 'Histoire' !