Quand les Allemands étaient au service de la Pologne

Démarré par Archives, 08 Novembre 2023 à 18:06:06

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Posté par: René (IP Loggée)
Date: 26 avril, 2004 13:34

Au 16ème et 17ème siècle, l?armée polonaise est organisée suivant 2 « Autoraments » parallèles.
L?organisation étrangère (ou allemande) et l?organisation polonaise.

Au 17ème siècle les relations entre l?Allemagne et la Pologne étaient bonnes, la Bohême, la Silésie, la Moravie et la Poméranie étaient toutes en partie peuplées de Slaves, beaucoup d?Allemands vivaient dans la République polonaise, particulièrement dans le royaume de Prusse vassal de la Pologne, sur les cotes de la Baltique, en Courlande et en Livonie.
On peut voir à ce propos que ces régions participent à la mythologie allemande au même titre que les confins pour les Polonais. Il y avait aussi de nombreux Allemands dans les villes polonaises. Par exemple Dantzig/Gdansk, capitale de la Prusse Royal et de loin la plus riche et la plus grande cité de la République polonaise ne comptait pas beaucoup de polonais dans ces murs.

De ce fait les Allemands eurent une grande influence sur l?armée polonaise et une partie de l?armée était organisée sur le modèle allemand. Cette partie du recrutement est appelée « Autorament » étranger (ou Allemand), de fait les chefs polonais faisait la différence entre les Allemands et les autres étrangers de l?Ouest, d?ailleurs le mot « Allemand » semble designer un autochtone qui ne parle pas la langue polonaise « Niemiec » (les linguistes reprendront peut être cette simplification nie-miec (de mowic ?)).
Le régiment standard Allemand de l?armée polonaise était composé de volontaires levés dans les villages. La force d?un régiment était calculée en rations « Porcje » et en chevaux dans la cavalerie. Le colonel recevait donc une somme par ration, on estime que les soldats étaient 15 à 10 % moins nombreux que les rations déclarées.
Le nombre standard de rations était de 1500 divisé en 12 compagnies de mousquets ou piques (de 6 mètres), chaque compagnie est divisée en 3 ou 4 "caporaleries" elles même divisées en 3 ou 4 rotas de 6 soldats.
Le niveau d?entraînement était élevé, et la discipline stricte, comme il y avait beaucoup d?officiers, ce genre d?unités coûtait plus cher qu?une unité d?organisation polonaise.

Les nobles polonais n?appréciaient pas beaucoup ces mercenaires étrangers, non seulement parce que les officiers supérieurs se forgeaient des fortunes personnelles sur le dos de leurs soldats, mais aussi parce que le roi commence à avoir plus confiance en eux que dans les Polonais.
Par la suite, la qualité des troupes allemandes tend à baisser, en 1628 pour la première fois un régiment de 1000 polonais est recruté sous organisation allemande sous Reinhold Rosen.

L?accession au trône du roi Wladislaw IV apporte un plus grand changement dans l?organisation étrangère. En 1633 alors qu?il organise une expédition pour prendre Smolensk et avec le peu de troupes mercenaires allemandes disponibles à cause des grosses hémorragies dues à la guerre de trente ans, il remplit les rangs de son infanterie allemande avec des polonais. Avec le temps ces unités allemandes polonisées deviennent la règle, bien que ce soit seulement un pas vers une armée entièrement polonaise. Car pour l?instant ils sont encore habillés, organisés à l?Allemande, commandé par des officiers étrangers, entraînés à l?Allemande, sans que la plupart ne parlent un mot de cette langue. La plupart des recrues proviennent quand même des provinces germanophones polonaises ou de Courlande et Livonie en Lithuanie.

La révolte des cosaques en 1648 et la mort de Wladislaw force son successeur Jan Kazimierz à recruter à nouveau des mercenaires libérés par la fin de la guerre de trente ans, paralysant la polonisation de cette partie de l?armée pour de nombreuses années. Vers le début des années 1670, sous l?influence des recommandations du Kaszstelan de Lwow andrezj Maksymiliam Fredo, des réorganisations sont apportées par Sobieski. Celui ci obtient aussi un meilleur contrôle de l?armée.
L?infanterie allemande est rhabillée en uniforme polonais, mieux adapté au style de guerre des confins. L?entraînement polonais est adopté dans quelques régiments et les étrangers n?eurent plus le droit de devenir des officiers supérieurs. Les régiments ramenés à 4 compagnies de 600 hommes ou moins sont renommés « Pulk » et les compagnies « Chorangiew ».La division de l?armée entre Autorament polonais et étrangers est alors abandonnée. Mais comme beaucoup de ces changements ne sont que cosmétiques, l?influence de l?organisation étrangère persiste. Le brassage des deux influences apporte à l?une et à l?autre des types d?organisation des nouvelles méthodes de combat, de siège, ou des nouvelles pièces d?équipement non alors utilisées soit à l?Ouest soit dans les confins.

La Cavalerie Allemande.

Les généraux polonais avaient beaucoup d?estime pour leur cavalerie allemande, dans les années 1650 le roi Jan Kazimierz les préférait aux hussards, et en 1652 après le désastre de Batoh, leur salaire était supérieur à celui des Hussards 65 Zloty contre 41. Pendant plus de 10 ans leur nombre était nettement supérieur à celui des Hussards.
En Pologne, le cavalier du style de l?Ouest était appelé « Reiter » ou « Rajtar. Ce terme couvrait tous les types de cavaliers « Lanciers », « Cuirassiers » ou « Arquebusiers », bien que ces appellations fussent utilisées aussi de temps en temps. Mais de même ces reiters polonais différaient de leur équivalent des armées de l?Ouest. Ils montaient des chevaux lourds de Frise, contrairement aux plus légers pur-sang des Hussards. Leur équipement provenait de Silésie ou de Prusse où les unités étaient souvent levées ou au moins elles stationnaient au repos près de ces provinces pour se ré équiper facilement.
Une partie de la cavalerie allemande, les Arquebusiers semblent cependant avoir été équipé de vêtements au style polonais, ils portaient les mêmes uniformes que les Hussards Ailés mais sans lances. Un relief gravé de « Bassano » identifie en temps que Arquebusier une unité commandée par Michal K Radziwill entrant à Vienne en 1679 habillé en Hussard avec des ailes.


La Garde Royale

La garde royale ou Armée de la Court était levée indépendamment de l?armée de l?état et était payée par le trésor de la Maison du Roi. En temps de paix les effectifs étaient limités à environ 1200 hommes. Ceci plus pour une raison politique qu?économique, car les nobles craignaient que cette armée privée permette au roi de reprendre le pouvoir absolu et ne liquide leurs avantages. En temps de guerre la garde devenait une source importante d?hommes et d?officiers bien entraînés, ceux ci étaient alors payé par l?état de grosses sommes.
Les unités de la garde se distinguaient par le préfixe J.K.M, (son altesse royale ) avant leur titre.

Les « Drabants » et « Reiters » du Roi.
Les « Drabants » étaient les gardes du corps personnel du roi, ils étaient constitués de nobles et de vétérans fidèles. De temps à autres ils furent appelés « Stipatores » (Hallebardiers), « Harcerzy » (Archers) mais le plus souvent « Drabants » .
La première référence à ce corps remonte à 1565, quand un Italien « Ruggieri » mentionne une garde du corps de 150 « Drabants » Hallebardiers recevant des uniformes a parement de fourrure de renard 2 fois par an, accompagnant le roi sur les routes, ils empruntaient des bottes, des éperons et des chevaux dans les écuries royales. Dans les années 1580 les hommes de cette unité étaient souvent nommés Rotmistrz dans l?unité « Wybraniecka ».
Après les années 1630 les « Drabants" devinrent proche d?une unité de Reiters allemands, l?unité combinée prenant alors le nom de Drabant-Reiters.
L?unité qui incluait de nombreux prisonniers de guerre (le patriotisme de l?époque ou le nationalisme n?existe pas chez les simples soldats, il s?agit plus de fidélité au chef) combattit à de nombreuses reprises et se distingua souvent.
En 1663 dans une bataille contre les Moscovites, le fils du maréchal français Grammont vit ce régiment des Reiters du roi composé de 1000 cavaliers formant 6 escadrons, charger à plusieurs reprises.

Les hussards de la Court Porte-Bannière.
Cette unité est composée de jeunes nobles et de courtisans ambitieux, qui servent pour l?honneur plutôt que pour l?argent. Chaque noble fournit un « Poczet » d?hommes, pour suivre la Court, ils sont habillés aussi magnifiquement que les moyens du noble dont ils dépendent permettent à celui ci, dans les couleurs de son choix. Ils jouent une place prédominante dans les cérémonies, dans lesquels ils sont précédés par la bannière du Royaume qui est portée à dos de cheval par le porte bannière de la couronne. La taille de cette unité a varié dans le temps entre 1000 et 100 chevaux..

La garde royale à pied.
Depuis les années 1630 la garde royal contenait au moins un régiment d?infanterie allemand connu comme Garde à Pied du Roi ou Garde du Corps du Roi. Elle était d?une force de 600 à 1200 hommes, la moitié étaient des Piquiers et l?autre moitié des Mousquetaires. Ils portaient un uniforme tout bleu avec un liseré jaune, du style de l?Ouest. Comme les couleurs de la plupart des uniformes de la garde royal polonaises des rois polonais de la dynastie Vasa, il y avait clairement une allusion à leur prétention au trône de Suède.

Les dragons.
Le régiment de Dragon du roi fut formé dans les années 1630 et a existé avec quelques interruptions jusque vers la fin de la royauté. En 1646, ils portent un uniforme rouge a rayures dorées, culotte bouffante de même couleur et bottes cuissardes, ils sont sous le commandement du frère de la reine Louis de Maligny, Marquis d?Arquien.

Cavalerie légère
Au 16ème siècle elle était fournie par une unité de Hussards armés légèrement. A quelques occasions avant la fin du 16ème siècle ils furent remplacés par des Tatars et des Cosaques, ils étaient utilisés comme messagers ou comme escorte. En 1646, ils portent un uniforme rouge.

Les Haiduk Hongrois
Le roi Bathory fut le premier a utiliser les Haiduks dans sa garde et Sigismund III a son tour en avait à peu près 400. Des compagnies étaient habillées entièrement en rouge et d?autres en bleu. Sous Sobieski, il y avait encore deux compagnies et seulement l?une d?elle était composés de Hongrois.

Les Suisses ou autres gardes de l?Ouest
En 1574, quand le nouveau roi élu, le français Henri de Valois, arrive en Pologne il est accompagné d?une garde du corps personnel de 40 mousquetaires wallons et de 60 Hallebardiers suisses.
La femme de Sobieski, avait aussi sa propre garde du corps suisse. Ils furent introduit pense t'on par le père de celle ci, Le marquis Henri de la Grange d?Arquien, qui s?installa en Pologne en 1678. Il était avant capitaine aux Gardes du corps suisses de Philippe duc d?Orléans, le frère de Louis XIV. Trente d?entre eux étaient employés à la garde du château royal à Varsovie en 1681.

Les Janissaires.
De petites unités de janissaires habillés dans le style turc, chacune portant ses couleurs, étaient entretenues par de puissants magnats, des « Hetman » et le roi lui-même, jusqu'à la fin du 18ème. Les premiers furent des prisonniers fait à Chocim par Sobieski, mais d?autres furent recrutés parmi les paysans Ruthènes, Moldaves et Wallaches, en fonction de leur pilosité brune et du port de longues moustaches. Une deuxième compagnie fut ajoutée à la garde de Sobieski en 1681, cette compagnie avait déserté de la citadelle occupée par les Turcs de Kamieniec en Podholie, avec armes, bagages, drapeaux, argent et officiers, pour offrir ces services au roi de Pologne. Deux compagnies au nombre de 200 hommes accompagnèrent Sobieski à Vienne sous le commandement de Gorzynski.

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Posté par: René (IP Loggée)
Date: 07 mai, 2004 09:38

Le terme Drabant se retrouve aujourd'hui écrit Trabant (comme la voiture) qui signifie compagnon-serviteur.

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Posté par: jk (IP Loggée)
Date: 07 mai, 2004 17:19

chapeau devant ton érudition.

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Posté par: René (IP Loggée)
Date: 10 mai, 2004 08:52

Heureusement qu'il y a ce site pour partager avec ceux que ça interesse sinon savoir tout seul dans son coin c'est enrichissant personnelement mais un peu frustrant, car plus on découvre plus il y a de questions qui se posent.