.
Les familles durant la semaine avaient stocké de la nourriture et
tous les week end nous en emportions à Cracovie. Le déballage des
provisions se transformait en fête, ressemblant au passage du père
Noël . Nous partagions dans la joie des menus communs. En général
en début de semaine les repas étaient presque "gargantuesques",
par contre les fins étaient plutôt maigres. Ce n'était pas
une mauvaise gestion , oh! non, le problème était que c'étaient
des denrées périssables . Mais quand on est jeune cela n'a pas beaucoup
d'importance il y a "d'autres chats à fouetter ". Il est bien connu
que les étudiants ne vivent pas uniquement pour apprendre sagement
ce que leurs chers maîtres essayent de leur transmettre. Nous étions
surtout des révoltés, des turbulents. La situation politico-économique
en Pologne s'aggravait. Il y avait des grèves, des manifestations,
des provocations avec la milice. Bref, l'antipathie réciproque.
Les étudiants en colère entraînaient facilement la population et
soutenaient le monde ouvrier. Ce n'était pas la première
fois dans l'histoire que les mouvements commençaient par
des manifestations d' étudiants. Les autorités le savaient et le
craignaient énormément. Il fallait donc surveiller les endroits
fréquentés par ces jeunes: les facs, les églises (lieu d'opposition
à l'époque), et les résidences universitaires. Quand les forces
de la milice rôdaient autour des nos résidences , les sacs plastique
remplis d'eau tombaient "du ciel". Chacun visait comme il le pouvait.
En réponse, nous avons eu droit au gaz lacrymogène et aux coupures
d'eau pour 2 jours. Ce n'était rien, l'imagination ne nous manquait
pas. "Les jeux dangereux" continuaient et même prenaient plus d'ampleur.
Chaque jour les relations flics - étudiants devenaient de plus en
plus tendues. La situation dans le pays s'alourdissait. De gros
nuages sont apparus dans le ciel polonais. Les étudiants et les
ouvriers tenaient bon. On pressentait que cela ne pouvait pas durer,
qu'un jour ça allait éclater. Quand, comment et sous quelle forme
personne ne pouvait prévoir.
Suite >>